lundi 14 avril 2014

Le naufrage des incipits (1)

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Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de dire ouf. Et au matin je ne me souvenais de rien, ni des rêves qui m’avaient sans doute agités ni de l’incipit du roman que j’avais tenté d’élaborer en pensée dès que l’obscurité s’était faite. J’en éprouvais de la rage. Et j’avais beau me coucher de plus en plus tôt, moucher la bougie avant même de ressentir les premiers symptômes de la somnolence, rien n’y faisait. La phrase dansait quelques secondes dans ma tête, je croyais la tenir, je lui ajoutais une virgule, changeai un mot ou deux puis – plus rien. A la fin, je renonçai. A quoi bon concevoir une œuvre immense si son simple début vous échappe sans cesse.

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